Vaincre l'allergie aux noix avec OuiNut

 

Pour ce nouveau portrait d’entrepreneur,  nous avons été à la rencontre de Simon Diallo-Blais et Rutherford Exius, actuellement en train de développer un projet très innovant pour vaincre l’allergie aux noix.

Pouvez-vous nous parler un peu de vous?

Simon

Je suis un des cofondateurs de OuiNut, une entreprise démarrée en octobre 2021. J’ai fait un BAC en Biochimie – spécialisation en médecine moléculaire à l’Université de Montréal (UdeM.) Je suis également en train de compléter une Maitrise en génie biomédical. Je travaille aussi comme ingénieur système dans une compagnie d’outils biomédicaux.

Rutherford

Je suis l’autre cofondateur de OuiNut. J’ai un BAC en pharmacologie de McGill, une maitrise en médecine expérimentale avec concentration en allergie chez les enfants. Je poursuis mes études en Droit à l’Université de Montréal. Je suis un étudiant et un entrepreneur à temps plein. En bref, j’ai un agenda bien rempli.

Justement, on voit que vous êtes des hommes bien occupés. Comment faites-vous pour bien gérer votre emploi du temps ?

Rutherford

J’utilise mon agenda judicieusement, je minimise les temps morts et maximise les autres activités. Pour mes temps libres, j’ai  5 ou 6 émissions que je regarde sur Netflix et des chaines YouTube que je suis quasi religieusement. Finalement, j’ai un excellent partenaire d’affaires avec qui je partage un agenda en ligne, donc il peut me faire des rappels pour certaines tâches ou même en prendre plus sur son dos lorsque je suis en période d’examens. J’ai aussi une partenaire de vie incroyable qui est, à mes yeux, l’incarnation de la bonne gestion de temps. Elle est en médecine et trouve quand même le temps d’être dans un comité étudiant, faire de la recherche, du bénévolat et elle travaille à temps partiel. J’essaie quotidiennement de calquer ses trucs de gestion de temps pour avoir du succès dans ce que je fais que ce soit mes études ou l’entrepreneuriat.

Simon

Avoir un partenaire et une équipe permet vraiment une meilleure optimisation du temps. Étant donné que le temps est notre ressource la plus rare, il faut en prendre soin. On essaie de consacrer notre temps à nos priorités seulement afin de produire le meilleur résultat. On aimerait bien sûr tout faire, mais cela est impossible. Il faut savoir prioriser et trancher. D’un point de vue personnel, j’aime définir et réserver des moments dans mon horaire pour mes différents projets. Cela me permet de me consacrer pleinement à un projet à la fois et d’être plus efficace.

Je crois que vous vous connaissez depuis un moment, parlez-nous de votre rencontre.

Simon

Oui, on se connait depuis longtemps. On s’est rencontrés en secondaire 1 à Brébeuf. On a parfois été dans les mêmes classes, mais on a surtout joué au basketball ensemble.  On est vraiment des amis de longue date. On a été séparés lors de nos études universitaires puisque Rutherford était à McGill et moi à l’UdeM.

Comment vous est venu l’idée de votre projet ?

Simon

À la fin de la pandémie, on s’est revu et l’idée de OuiNut a germé. Mais on a eu l’idée à l’été 2021. En fait, c’est Rutherford qui m’a parlé de ce projet parce qu’il travaillait dans une clinique qui traitait les allergies alimentaires. Il m’a exposé la problématique du moment. Au début de l’automne, notre projet s’est concrétisé et on s’est dit qu’on pourrait essayer de régler ce problème et travailler ensemble.

Rutherford

C’est vraiment une problématique qui a été observée en clinique en discutant avec des parents. J’en ai parlé avec Simon, il a été surpris de constater qu’il y ait autant de problèmes dans ce milieu que l’on croit aussi avancé, la médecine. On a pu faire une première validation de notre idée avec le CEuMONTRÉAL en participant à Esquissez, on a d’ailleurs gagné un prix.

Source de l’image: CEuMONTRÉAL
En tant qu’entrepreneurs et étudiants, quelle est votre définition de l’entrepreneur?

Rutherford

Pour moi, un entrepreneur, c’est quelqu’un qui est toujours à la recherche de solutions dans différents domaines. C’est également quelqu’un qui cherche à acquérir de nouvelles connaissances, de nouveaux savoirs. Et qui n’a pas la langue dans sa poche, qui pose des questions et n’a pas peur d’être ridicule. Mais, aussi une personne qui pose des questions pour aller chercher des solutions même s’il n’a pas toutes les réponses.

Simon

Ma vision rejoint beaucoup celle de Rutherford surtout dans l’aspect d’une personne qui est toujours avide de connaissances. C’est sûr qu’en étant entrepreneur on touche à beaucoup de domaines connexes pour la création d’entreprises. Donc, il faut toujours être prêt à apprendre quelque chose de nouveau. Pour moi, c’est aussi quelqu’un qui n’a pas peur des risques et de tenter quelque chose de nouveau, mais aussi de gérer ces risques.

Vous venez de recevoir une bourse Pierre-Péladeau, encore toutes nos félicitations.  Pouvez-vous nous dire où vous en êtes dans votre projet entrepreneurial ?

Simon

Notre projet a vu le jour assez récemment en octobre 2021. Depuis, on s’est lancé dans une validation avec des médecins et des parents. On a vraiment eu la chance que Rutherford travaillait dans une clinique. On a pu tâter le terrain auprès de cette clientèle et voir leur réaction par rapport à un produit qui pourrait les aider à gérer les allergies. Dans un deuxième temps, on s’est occupés de l’aspect légal. Maintenant, nous en sommes à l’étape de la recherche et du développement. Nous sommes en train d’élaborer un prototype qui devrait être prêt prochainement.

Rutherford

La recherche et le développement se fait surtout en laboratoire, mais en parallèle, on est toujours à la recherche de financement, on s’occupe de développer le marketing et voir comment on peut informer notre future clientèle de manière adéquate. Nous sommes aussi toujours à l’affut des nouvelles scientifiques dans ce domaine.

Simon

C’est vrai qu’on a dû se mettre au marketing alors que ce n’est pas particulièrement notre domaine, nous sommes des scientifiques. Mais comme on l’a mentionné tantôt, en tant qu’entrepreneur on doit toucher à tout. On a sorti un site Web www.ouinut.ca, on veut vraiment vulgariser l’information pour éduquer et simplifier la vie des parents afin qu’ils puissent bien comprendre ce qu’est une allergie.

Rutherford

Trouver du temps pour réussir à faire tout ce que l’on doit faire. Chercher des nouvelles connaissances et savoir où les trouver. Bien s’entourer  aussi. En fait, quand on arrive à un point où on se dit on n’a plus rien à faire, c’est un problème, on ne devrait jamais rien à faire. En général, quand on a un petit temps mort, c’est que l’on a oublié quelque chose. Ce sont des petites difficultés comme un courriel que l’on n’a pas lu, mais qui était important. On passe à travers cela en gardant un agenda organisé, en étant rigoureux  dans ce que l’on fait. En s’entourant bien aussi,  même si on n’a pas d’équipe formelle, on est vraiment bien entourés: nos amis de Brébeuf, de l’Université de Montréal, nos mentors qui croient en nous.

Simon

Effectivement, la plus grande difficulté, c’est le temps. C’est notre ressource la plus rare. Au début, c’est long de démarrer la machine parce qu’il y a beaucoup de nouvelles connaissances à aller chercher. Justement, on a eu la chance de participer au concours du CEuMONTRÉAL qui nous a beaucoup aidés dans ce domaine. Même si au début on voulait tout faire en même temps, on a dû prendre le temps de se former. Une fois qu’on a eu cette base  de connaissances, c’était plus facile. On s’est également équipé avec des outils de gestion de projets et de l’aide extérieure qui nous a appris à mieux gérer le temps et nous concentrer sur les priorités.

Vous parliez de mentors qui ont cru en vous et qui vous ont soutenus, justement y a-t-il eu des personnes qui vous ont inspiré pour créer votre entreprise, peut-être qui sont des modèles pour vous?

Simon

Oui, j’ai eu la chance de côtoyer un professeur de l’UdeM, pendant que je faisais ma maitrise en génie biomédical, le Pr Alexis Vallée-Bélisle. Je l’ai vu créer une entreprise grâce à des connaissances acquises en laboratoire, j’ai donc pu voir le processus entrepreneurial. Sinon, j’ai plusieurs amis qui ont démarré leurs entreprises, certaines plus petites, d’autres qui sont plus grosses et bien établies. Un exemple qui me vient en tête, c’est Patrick Issid, cofondateur de Medfar, je l’ai rencontré à Brébeuf. Il a vraiment été une source d’inspiration, voir comment il a réussi à créer, à partir d’ici, une entreprise qui est internationale maintenant, c’est très inspirant.

Rutherford

C’est certain que nos amis avec qui on a grandi ont été une source d’inspiration. Mais aussi des personnes dont j’ai vu le cheminement. Par exemple, le chancelier de l’UDEM, Frantz Saintellemy avec qui on a pu discuter quand on a reçu notre Bourse. Le fait qu’il soit haïtien a fait dire à mon père: s’il est capable, toi aussi, let’s go! C’est motivant de rencontrer ce genre de personnes. S’ils ont réussi, c’est parce qu’ils se sont lancés, ils se sont peut-être cassé la figure, mais ils ont persévéré. J’ai aussi des membres de ma famille qui sont entrepreneurs et qui m’ont également servi de modèles.

Votre entreprise est encore relativement jeune, mais, y a-t-il eu une évolution dans votre projet ?

Simon

Quand Rutherford m’a parlé de la situation en clinique, on avait déjà pas mal cerné le problème.  La désensibilisation alimentaire se fait avec un médecin qui va prescrire une quantité spécifique d’allergène, dans notre cas des arachides. Mais arrivés au stade de l’implémentation de cette thérapie, les parents sont laissés à eux-mêmes et doivent calculer eux-mêmes la quantité d’arachides à donner. Quand j’ai appris cela, je n’y croyais tout simplement pas. Quand je pense à mon propre exemple, j’ai subi une désensibilisation étant jeune, j’avais une allergie assez rare, le processus se faisait donc par injection en clinique. C’était calculé au millilitre près. L’allergie aux arachides est très commune et on laisserait les parents se débrouiller seuls sans aucune aide pour déterminer les quantités? Donc, on a su rapidement où se situait la problématique à régler. Au niveau du produit en tant que tel, il se pourrait que cela change un peu dans quelques mois. On veut une certaine taille et texture, mais il se pourrait que le choix des parents et des enfants soit différent. On est très ouvert à changer la forme, mais le fond du produit est le même.

Rutherford

C’est certain que le produit va évoluer. On avait fait une pré validation, mais avec le contact avec la clientèle ça peut complètement changer le produit tout en réglant le même problème. La recherche et développement est là pour ça. On avait déjà modifié la taille après les suggestions de notre chef de projet, ça va certainement encore changer, mais on le fait toujours pour le mieux.

Quelles sont vos valeurs, idéaux ou philosophie de travail?

Simon

En tant que scientifiques, on a voulu se baser sur la science. On veut que nos décisions soient prises par rapport à des études et des données scientifiques et pas seulement sur les sentiments. C’est important pour nous d’avoir cette rigueur de proposer une amélioration basée sur des données. Il y a toujours des nouvelles études qui changent les perceptions des médecins par rapport aux allergènes.

Rutherford

On a les mêmes valeurs qui nous ont été inculquées dès notre jeune âge. La rigueur avant tout. Si on suit quelque chose qui ne fonctionne pas et qu’un expert nous dit quelque chose, on essaie de valider avec d’autres, l’hypothèse devient une théorie, on la suit. On essaie aussi de partager une information scientifique vulgarisée pour qu’elle soit compréhensible pour tous. C’est important que le plus de personnes autour de l’enfant comprennent comment fonctionne une allergie, le processus de désensibilisation et la vie après.

 

Source de l’image: Dominic

De gauche à droite: Géraldine Dumesnil, Rutherford Exius, Simon Diallo-Blais, Ferdaous Dorai.

Il y a différentes manières de voir la réussite ou le succès. Pour vous, ça serait quoi?

Rutherford

On saura qu’on aura du succès quand on aura un impact tangible sur la vie de notre clientèle cible si on parler en termes d’entrepreneurs. Sinon sur les gens de notre communauté,  du Québec, Canada et même du monde. Le plus beau serait d’arriver dans une salle de classe et qu’il n’y ait plus cette affiche avec une arachide portant une barre rouge que les enfants aient une meilleure qualité de vie et aller normalement aux fêtes de leurs amis sans risques potentiellement mortels. Si on peut avoir un impact positif sur tous les parents qui vivent avec un enfant allergique, on pourra dire qu’on a réussi.

Simon

Notre but n’est pas de créer une entreprise pour créer une entreprise. C’est vraiment de simplifier le processus de désensibilisation en clinique et par le fait même la vie des parents et des enfants. Ça va être ça notre succès!

Vous avez certainement reçu de nombreux conseils avant de vous lancer. Que conseillerez-vous à quelqu’un veut se lancer en entrepreneuriat?

Simon

Il y a beaucoup de choses à faire, mais je dirais de bien s’entourer, avoir une bonne équipe et ne pas hésiter d’en parler à du monde. Car ce qui est difficile au début c’est tout faire et le faire bien. C’est très compliqué quand on est seul. Mais, en allant voir des gens, ils peuvent aider à mener le projet à terme et à grandir plus rapidement.

Rutherford

En parlant autour de soi, on trouve les personnes les plus compatibles qui vont pouvoir aider. L’idée qu’on a au début, c’est presque rien en entrepreneuriat, c’est l’étincelle, mais, comme pour un feu il va falloir le nourrir. Avoir une bonne équipe c’est très important, il faut en parler autour de soi et ne pas avoir peur qu’on te vole une idée puisque ce sont des amis. Les soirées de brainstorming, ça se fait mieux en partageant cela avec des amis.

C’est déjà le mot de la fin. Que pourrait-on vous souhaiter pour le futur?

Simon

Avec OuiNut, on aimerait beaucoup changer les appréhensions des parents et de la société en général envers les allergies alimentaires. Ça va être un grand défi pour nous et c’est pour cela que l’on veut faire beaucoup de sensibilisation. Il y a une grande crainte des allergies alimentaires, on voit partout l’affiche qui mentionne sans arachides. On souhaite que les parents soient ouverts àa la science et qui va améliorer la vie de leurs enfants en général.

Rutherford

On aimerait que OuiNut devienne comme Kleenex ou frigidaire, c’est-à-dire quand une chose est nommée par le nom d’une compagnie. Donc, quand on parle de désensibilisation, on voudrait que ce soit synonyme de OuiNut. On veut aller le plus loin possible. Qu’on nous souhaite d’être toujours bien entourés pour aller plus loin. On aimerait aussi faire en sorte que la science continue à avancer pour donner les meilleures formations, ça serait parfait pour nous.

On veut vraiment remercier le CEuMONTRÉAL. On a eu beaucoup de soutien et on a beaucoup appris grâce à vous.  Merci également au Dr Moshe Ben-Shoshan une sommité en allergie qui travaille avec nous. Merci à tous ceux qui nous aident, nous soutiennent et croient en nous  

Source :
Emy Nzau
Coordonnatrice des relations avec les gradués et commandites.
emy.nzau@ceumontreal.ca
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